DES MILLIONS DE SOLITUDES >< MULTITUDE OF LONELINESS

 


  


Cette série est issue d'un voyage de trois semaines dans plusieurs grandes villes situées au centre, au sud et à l'ouest de la Chine en 2017.

Dans ce pays qui compte 1,5 millions d'habitants, Nadège Héraud superpose sa propre expérience de la solitude à celle des citadins de ces immenses métropoles aux rythmes de vies accélérés. Les animaux, errants ou exploités, semblent eux aussi perdus dans cette multitude. Ils sont pour la photographe un marqueur important dans notre manière de considérer le vivant et par projection celle de notre propre estime au sein de la société. Plus qu’un état d’âme, c’est un questionnement existentiel intime en miroir de la condition humaine.

 

> Mes voyages ne sont qu’un prétexte; un prétexte pour chercher les envers subjectifs d’un décor qui voudrait s’imposer d’emblée à mon regard. Ainsi, je déambule dans quelques villes chinoises; un environnement urbain  qui tend à côtoyer des flots d’individus pressés.

Et pourtant, sans l’avoir prémédité, la foule s’efface pour ne laisser apparaître que des êtres seuls. Dans l’euphorie de la découverte d’un territoire, d’une multitude de cultures et de traditions, mon regard se focalise sur la solitude de ces « autres », qui faute de n’être que la leur devient à revers la solitude de celle qui l’observe. Je m’interroge sur ma mélancolie, cette mélancolie qui colle à l’âme, où que l’on soit, comme du goudron chaud sous une  semelle trop neuve. Mon regard candide sur une destination fantasmée révèle alors ma propension à m’interroger, comme à chaque fois, sur l’espèce Humaine à laquelle j’appartiens, sur les animaux que l’on néglige monstrueusement jusqu’à la mort  et sur le vide intérieur auquel chacun est confronté où que l’on soit.

Mes voyages ne sont qu’un prétexte, un prétexte pour essayer d’accepter ce que nous sommes, ce que je suis.

< My travels are only a pretext; a pretext to look for the subjective side of a decor that would immediately impose itself to my eyes. Thus, I wander in some Chinese cities; a urban environment that tends to rub shoulders with the waves of people in a hurry. And yet, without having premeditated it, the crowd fades to reveal only single beings. In the euphoria of the discovery of a territory, of a multitude of cultures and traditions, my gaze focuses on the solitude of these "others", which for lack of being theirs becomes the loneliness of the other who observes it. I wonder about my melancholy, this melancholy that sticks to the soul, wherever we are, like hot tar under a new sole. My candid gaze on a fantasized destination then reveals my propensity to question myself, as always, about the human species to which I belong, to animals that are neglected monstrously until death. The inner emptiness that everyone faces everywhere. My travels are only a pretext, a pretext for trying to accept what we are; Accept what I am.